ou la lettre d'un chien aux responsables de la SPA qui ont viré une bénévole gratuitement...
qui pourtant leur apportait tellement,
alors forcément, je les soutiens... et surtout toi, Valérie, courage dans cette bataille qui t'est chère :

A tous les miens,

Mon frère et ami est mort depuis déjà un an, mais c’est en son nom que je vous écris.
Effectivement, pianoter sur ce clavier n’est pas aisé pour des gros coussinets de croisé labrador, mais muni de mes ergots (eh oui ! moi j’en ai ! na !), je m’en sors plutôt pas mal, non ?

Mon frère de misère, c’était Oxford, un papy comme on dit chez nous, 9 ans, le beau gosse que personne ne voyait, dans un sale état, train arrière atrophié, regard vide, poil terne.
Dans son box, il se laissait mourir, c’était à l’ancienne SPA de Maurin, ils étaient plusieurs dans le même box, un seul, au fond se laissait mourir, c’était mon frère de misère.
Pour lui, plus rien de la vie ne pouvait arriver,
être aimé, pouponné, choyé, gratouillé sur le ventre (les 4 pattes qui me liront sauront de quoi je parle !), être juste regardé, tu parles ?! Tout ça, il avait même oublié ce que c’était !
Et n’en rêvait même plus…

Et puis, un beau dimanche de mars, sous un beau soleil, en fait une journée comme les aime les humains : le calme du dimanche, on prend le temps, on A LE TEMPS, on ne bosse pas, on ne court pas, on a le temps de se promener,
on a le temps de faire des heureux !
Et c’est EXACTEMENT ce qu’il s’est passé pour mon frère à 4 pattes, un petit couple est arrivé (et venait de loin) et AVAIT LE TEMPS ce dimanche après-midi, pour faire un heureux, pour sortir un des notres, prisonniers de ces cages,
et lui offrir la vie, l’amour, une famille.

Ce petit couple, c’est mes parents !
Ils ont rencontré Valérie, et après avoir fait le tour des pauvres cages, ont posé les yeux sur Oxford, qui tout au fond de son box, était couché, ne répondait même pas quand ils sifflaient et l’appelaient…
5 bonnes minutes sont passées avant qu’il ne lève la tête, et encore quelques minutes de plus avant qu’il ne se lève et vienne près de la grille…
A quoi bon se lever ?
A quoi bon espérer ?
Puisque c’est toujours le plus beau, le plus jeune, le plus amusant qui s’en va…
Les vieux, comme lui, on les oublie, on ne les voit pas, on les laisse…

Mais là, sa vie a changé, devant ce regard tellement vide, devant cette tête à bisous tellement en manque, devant cette tristesse sur 4 pattes, mes parents ont dit « c’est lui ! » !
Ils ont foncé voir Valérie, qui les a renseignés, elle connait par cœur chaque chien, elle sait ce qui convient à chacun de nous, parce qu’elle y passe du temps avec nous, parce qu’elle prend le temps, parce qu’avec elle, jamais un coucou sans un câlin, jamais une balade sans un gâteau, jamais un regard qui juge, juste un regard d’amour.
Parce qu’elle, même les vieux, les moches, elle les voit et elle les aime.
Dans notre jargon canin, on dit qu’elle a le cœur sur le coussinet, ça vous parle mieux ?

Alors, elle leur a dit que ce bon Oxford avait 9 ans, elle leur a demandé s’ils étaient sûrs d’eux ?
Un chien de 9 ans, c’est rare qu’on craque sur lui vous pensez !
Elle leur a expliqué son histoire, ce qu’ils en savaient au refuge, les risques qu’il pouvait y avoir, et voyant leur détermination, elle a ouvert le box et leur a sorti Oxford.
Ils sont partis le balader.
Mais peu importe, qu’il tire, qu’il court, qu’il marche, qu’il rampe, qu’il saute, qu’il mange, peu importe tout : le coup de foudre était là !!!
La magie de l’amour !

Oxford a donc connu l’amour d’un foyer, avec une maman raide dingue de lui, qui lui a tout appris, puisque ce bon vieux Oxford ne savait même pas monter des marches, il n’avait rien connu.
Mes parents ont essayé de tout lui apprendre, tout lui montrer, la neige, la mer, la ville, la campagne.
J’entends souvent ma maman dire
(mais oui vous savez bien, un chien, ça écoute toujours tout ! mais ça ne répète pas ! Sauf les chiens high-tech comme moi avec un PC dans les pattes !),
donc j’entends souvent ma maman dire qu’elle n’a quitté Oxford, que les 3 jours où elle est partie à la maternité. Même pour ses essayages de robe de mariée, Oxford était assis sur le paillasson de la boutique de leurs amis ! Il observait, sûrement avec des yeux d’amour, en tout cas, des yeux différents de ceux qu’il avait dans sa cage.

Trois ans à leurs côtés de vie d’amour,
Oxford est mort à 12 ans, mais il a vécu 3 ans de vraie vie, rendant sa famille si heureuse !
Tout ce bonheur, grâce à une bénévole, qui les a guidés, renseignés, écoutés, qui a eu le temps, un dimanche, de prendre le temps pour eux !
Une bénévole et 3 heureux !
C’est plutôt rentable, non ?

Quant à moi, c’est un peu la même histoire, moi j’ai été jeté de familles en familles, de séjours à la SPA, en séjours à la SPA.
Je suis tout noir, personne ne me voyait ! Jamais !
L’invisible d’une pauvre cage !
J’ai passé tellement de temps derrière les barreaux que j’ai fini par déprimer, c’est vrai, j’avoue, ma bonne humeur canine avait foutu le camp !
Ca vous brancherait, vous, d’être un numéro de box ? Ca vous brancherait, vous, d’être sorti 10 minutes par semaine ?
Heureusement pour nous, quand les bénévoles sont là, on revit, on sort, on se défoule la patte, on a des câlins, on revit quoi !
Mais j’avoue, à voir tous mes potes se faire adopter sauf moi, j’ai flanché, moral dans les ergots, ras la truffe de tout !
Alors, on m’a nommé chien du mois !

Et mes parents sont arrivés, un dimanche d’août, par une chaleur accablante, et m’ont sorti de cet enfer !
Un dimanche après-midi, toujours !
Parce que le dimanche c’est le jour de la famille, le jour où on a le temps, le jour où il fait bon vivre ! Heureusement pour moi, et pour les miens, le dimanche c’est ouvert !!
Combien de familles se sont cassées le nez devant une porte fermée ! pfff !

Depuis ce merveilleux dimanche, où mes parents, heureux de retrouver Valérie, m’ont adopté, je vis des jours heureux !
Je vais me baigner presque tous les jours, et gambader fièrement avec mes frères canins (Jack et Cubitus, deux autres frères de misère), maintenant on dit de moi que je suis un beau gosse, alors, vous voyez, nous les black, qu’on peut vous faire craquer !

Tout ça pour dire, et vous l’aurez compris, l’importance des bénévoles, qui nous connaissent, prennent le temps, nous sortent, nous gâtent, nous caressent, nous aiment, peuvent rassurer, guider, nos futurs familles.
La vie d’un refuge est rude, les cris, les pleures, le froid, la peur, l’attente, l’enfermement, alors s’il vous plaît, au nom de tous les chiens, au nom des miens, je vous le demande :
laissez-nous encore croire que l’homme peut être bon, laissez nous encore espérer que l’homme peut nous apporter quelque chose de doux et gratuit.
Laissez nous croire que tout peut s’arranger.
C’est ça, que nous apportent, chaque jour, les bénévoles présents.

Merci de m’avoir lu,

Caninement votre,

Ebène, 7 ans, toutes ses dents,
et le moral dans la truffe !

Ecrire avec ses coussinets...

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